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L'église Sant'Antonio de Trieste et les Schwachhofer

Les frères Carl-Christian et Ludwig SCHWACHHOFER sont arrivés à Trieste en 1801 fuyant leur ville de Mayence qui avait été investie par les armées de la Révolution puis intégrée dans la première République française. Mayence en tant que vieil état princier indépendant sous la souveraineté d'un archevêque prince-Electeur,  archichancelier du Saint Empire romain germanique, n'existait plus.

Durant tout le XVIIIe siècle la famille Schwachhofer, des musiciens, y avait servi à la Hofkapelle.

L’église Sant’Antonio Nuovo ou Sant’Antonio Taumaturgo, dédiée à Saint Antoine de Padoue, est l'église centrale bien connue de Trieste, située au bout du Canal Grande. Tout au tour est le quartier où ont habité les Schwachhofer au XIXème siècle.

L’église actuelle remplace une église paroissiale édifiée en 1776, qui est apparue inappropriée lorsque Trieste s’est brusquement développée au XVIIIe entrainant la création de la nouvelle cité, dite  "Borgo Teresiano".

C'est dans l'ancienne église Sant'Antonio que Lodovico Schwachhofer s’est marié le 30 janvier 1814 avec Giuseppina Gnesda dont la mère Vittoria Dubane, une "convertie de religion arménienne", venait de Salonique.

Dans cette même église leur premier enfant, Adolfo, fut baptisé le 9 juillet 1815, le lendemain de sa naissance. Celle-ci suivait de moins d'un mois celle de sa future belle-soeur Clarissa Wessely. Entre ces 2 naissances avait eu lieu la bataille de Waterloo et la fin de l'empire français.

Adolfo se mariera en effet avec la sœur de Clarissa, Maria WESSELY. le 12 mai 1842, mais cette fois dans l'église nouvelle Sant’ Antonio.

 

 

La nouvelle église Sant’Antonio venait d'être ouverte au culte en 1842.  Après un premier projet en 1808, stoppé par l’occupation française de 1809-1813, la construction de l’église commença en 1828. Œuvre de Pietro Nobile c’est un édifice de plan basilical et de style néoclassique avec une façade à 6 colonnes ioniennes et avec un attique portant les statues des 6 saints protecteurs de la cité. Elle est couverte d’une vaste coupole elliptique non visible sur la vue ci-dessous.

 

 

 

Un registre paroissial de l'église fournit des précisions autour du mariage d'Adolfo et de Maria :

D. Adolphuus Andreas Carolus Schwachhofer, mercator, né à : Tergestum C. Th. (Cita Theresia)
domicile              C nuovo Cit  n°  816    tempus domicilii : 13 ans   (donc depuis 1829) 
âge:                     26 ans ,
                            fillius Dftu Ludovicus Schwachhofer mercator & D. Josepha n. Gnesda
avec                    D  Maria Willemina Clementina Wessely       née à : Tergestum,
domicile              cita Theresiano n° 816 , 14 ans  (donc depuis 1828),
âge                     23 ans
témoins:             Christiano Gregorio D

 

Les familles des mariés habitaient donc depuis 1828-9, à la même adresse, au n° 816 sur le plan cadastré de la Città Nuova

Quelle était l'explication  de cette curieuse situation ?

À Trieste Carl Christian était le leader influent et riche de la famille issue des Schwachhofer de Mayence. Depuis 1815 il possédait son affaire de commerce-manufacture implantée dans la Dogana Vecchia, piazza della Borsa. Lors de la création de la société d'assurances Riunione Adriatica di Sicurtà en 1838 il est un des deux Directeurs élus.  

En 1826 Carl Christian Schwachhofer fit l’acquisition d’une très grande maison numérotée 816 sur le plan du borgo Théresiana car La Dogana Vecchia au centre de la ville devait être démolie pour permettre la construction du Tergesteum, édifice ouvert en 1840.

La "casa 826" de style neo-classique, bâtie en 1782 pour le négociant Ignazio Gadolla (sur la piazza Gadolla appelée par la suite piazza Nuova, piazza Mazzini et maintenant della Republica), était un édifice historique. Après l'abdication de Napoléon à Fontainebleau en 1814 son frère Jérome Bonaparte ex-roi de Westphalie en fuite à Trieste fit l’acquisition de cette casa pour y loger sa suite de 54 personnes. Il fit cette acquisition pour 263.000 francs (100.000 florins) début 1815, moins d’une semaine avant le retour de l’ile d’Elbe de son frère: dès qu'il connut la nouvelle, Jérôme parvint à déjouer la surveillance autrichienne et à s’enfuir de Trieste pour rejoindre son frère qu’il accompagnera jusqu'à Waterloo.

Revenu à Trieste il revendit cette maison en 1818 à sa sœur Elisa ex-grande-duchesse de Toscane qui mourut en 1820 à Trieste. Une autre sœur de Napoléon, Caroline Murat ex-reine de Naples, l’habita plusieurs mois en 1824-5 avant de s’installer dans la belle villa Murat à Trieste.

Après l'acquisition de cette construction Carl Christian la fit agrandir en 1828 par l’architecte Antonio Buttazzoni qui lui ajouta un 3ème étage avec 7 fenêtres et une entrée sous des colonnes doriques supportant un balcon.

Le ménage Carl-Christian et Maximiliana Schwachhofer n'y habitait pas. C-C s'était fait construire une très belle villa, toujours existante au n°25 via Romagna par ce même architecte Buttazzoni alors fort estimé dans la cité. Après la mort de Carl Christian en 1843 la "casa 826" fut vendue en 1847 au négociant Duma, d’où son nom de Casa Duma.

Dès 1828-9 une fois agrandie le 816 fut habitée par son frère Lodovico Schwachhofer et par les Wessely. Lodovico y meurt en 1840, laissant veuve son épouse Giuseppina née Gnesda et 4 enfants vivants dont l'aîné Adolfo qui, comme indiqué ci-dessus, avait été baptisé dans l'ancienne église Sant'Antonio.

Parmi les notables commerçants de Trieste en relation avec Carl-Christian il y avait le négociant Giuseppe WESSELY, un des 6 membres de la députation dirigeant la Bourse de Commerce, la Borsa Mercantile. Comme décrit dans "famille Wessely et Vianello", il était venu jeune marié de Salonique pour s'établir à Trieste vers 1814 et il a eu 5 enfants dont d'abord 3 filles Clarissa, Carolina et Maria née le 10 juin 1818.

En fait dans notre souvenir familial Maria a toujours été appelée Mariette.

À cette époque les nombreuses maisons de commerce occupaient de grandes demeures où les appartements d'habitation et d'apparat voisinaient les bureaux et les entrepôts.

Adolfo et Mariette ont ainsi passé 13 années sous le même toit, à des étages différents, avant de se marier et de se rapprocher un peu plus dans un même lit. Après cette longue attente ils ne se ménagent pas car Mariette va avoir un enfant presque chaque année : 3 filles et 4 garçons jusqu'au dernier en mars 1850.

Hélas, après 9 années de mariage Mariette meurt, âgée de 33 ans. Décédée à Gradisca on ne sait pas si cette fin est à lier à une nouvelle grossesse ?

En 1853 à peine 2 ans après la mort de Mariette sa sœur Clarissa perd son mari Gustav-Adolf Fesch mort de la variole. Devenue veuve avec 3 enfants qu'elle avait eu aussi de façon rapprochée dans les années 1835,36,37 elle aurait pu se remarier avec son beau-frère Adolfo qui avait exactement son âge ! Tous deux se trouvaient occupés de leurs affaires commerciales dont ils se retirent vers 1864.

Clarissa habitait alors dans un appartement le long du Grand-canal dans la belle construction appelée palais Gopčević mais après la mort de ses parents Wessely elle revient habiter à la casa Duma

En retraite Adolfo s'occupe d'une institution importante de la ville, la Pubblica Beneficenza dont il sera élu vice-président en 1869.

À sa mort en 1880 il vivait via della Zonta, une rue perpendiculaire à l'église Sant Antonio et comme sa première femme, Mariette il est enterré au cimetière Sant'Anna dans le tombeau édifié par Carl-Christian

Adolfo et Mariette au temps de leur mariage en 1841

 Pour clore cet aperçu triestin on remarque que, si la cohabitation était déjà bien présente, les coups de foudre amoureux n'étaient pas le lot commun des mariages dans la société des négociants triestins, comme souvent en ce XIXeme siècle.

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